Euzhan Palcy - portrait d'une réalisatrice Martiniquaise engagée

CULTUREPORTRAITS

3/31/20223 min read

« Très tôt, j’ai très mal supporté que cet art que j’aimais tant me fasse tant souffrir. Nous n’étions pas sur les écrans, nous les Noirs. […] Quand je les voyais, c’était toujours dans des rôles complètement dégradants. »

Euzhan Palcy, France Culture, 2019.

1984 – La rue Cases-nègres : un succès international

Diplômes en poche, Euzhan travaille en tant qu’assistante sur différents films avant de réaliser un conte antillais pour FR3 en 1982, “L’Atelier du diable”. Pourtant, c’est l’adaptation du livre de Joseph Zobel, “La rue case nègres”, paru en 1950, qui lui offrira un succès international.

Sources ( clic pour ouvrir )
CNC - France Culture - Vulture

Originaire de la Martinique, Euzhan Palcy est la première réalisatrice Noire à remporter un César et à diriger une production hollywoodienne. C’est l’occasion pour nous de revenir sur la carrière de cette réalisatrice, pionnière et engagée pour la représentation des Noirs au cinéma.

1975 – Son premier film : La Messagère

Euzhan naît en 1958, dans la commune du Gros-Morne en Martinique et très tôt, elle se passionne de littérature, de théâtre mais surtout de cinéma.

Encouragée par son père elle réalise, à 17 ans seulement, son premier film pour FR3-Martinique (aujourd’hui Martinique 1ère) : La Messagère.

Après ce succès local, elle s’envole vers Paris la même année pour poursuivre ses études à la Sorbonne puis à Louis-Lumière, déjà pleinement consciente de la mauvaise représentation des Noirs sur les écrans.

Euzhan a 14 ans quand elle lit l’ouvrage de l’auteur antillais. À travers le récit de sa propre enfance, l’auteur y décrit la Martinique des années 1930.

Parrainée par François Truffaut, elle parvient à récolter les fonds nécessaires à la réalisation du film, malgré les obstacles.

Son obstination porte ses fruits : “La Rue Case Nègres” est récompensé du César de la meilleure première œuvre en 1984. Euzhan Palcy rentre alors dans l’histoire du cinéma français, en devenant la première réalisatrice française – et Noire – à remporter la fameuse statuette. Au total, le film récoltera 17 récompenses nationales et internationales.

“C’était le premier auteur martiniquais que je découvrais, moi qui étais une grande lectrice, surtout de livres français. Pour une fois les mots recouvrent une réalité que je connaissais, celle des coupeurs de canne et des békés.”

E. Palcy pour le magazine Excessif

1989 – Une saison blanche et sèche : son premier film hollywoodien

Le succès de la rue Cases nègres ouvre à la réalisatrice martiniquaise les portes d’Hollywood en 1989. Elle signe avec la MGM pour produire « A dry white season » ("Une saison blanche et sèche" en français), un plaidoyer contre l’Apartheid en Afrique du Sud qui sévit à ce moment là. Elle s’y rend pour investiguer et risque d’être arrêtée et exécutée si son projet est découvert. Elle sera amenée à diriger des acteurs de renom pour la réalisation du film tels que Donald Sutherland et Marlon Brando. 2001, elle réalisera aussi le film The Killing Yard, qui traite du soulèvement de la prison d’Attica en 1971.

1992 - Siméon : Le zouk à l'honneur

Quelques ans avant The Killing Yard, Euzhan Palcy réalise Siméon, un conte musical antillais mettant notamment scène en scène plusieurs membres du groupe Kassav dans un récit mystique et merveilleux typiquement antillais.

S'ensuivront plusieurs téléfilms tels que Les Mariés de l'Isle Bourbon, Parcours de dissidents, Aimé Césaire a Voice for History... tout en restant relativement discrète dans les médias mainstream.

Jusqu'à ce jour, elle reste engagée dans la vie culturelle afro-caribéenne et milite pour les droits humains et contre la discrimination des Noirs dans l'audiovisuel.