Eugénia Charles : première femme cheffe d'état dans la Caraïbe

Surnommée "La Dame de fer de la Caraïbe", Eugénia Charles a été la première femme dirigeante d'un pays caribéen. Arrivée au pouvoir en 1980, elle totalise 15 années de service en tant que premier ministre de la Dominique.

CULTUREPORTRAITS

3/8/20223 min read

Eugénia, pionnière à plus d'un titre...

Née le 15 mai 1919 dans la petite commune de Pointe-Michel, au sud-ouest de la Dominique, Eugénia Charles est une descendante d'esclaves au second degré. La situation financière avantageuse de son père, exportateur de fruits puis banquier, lui permet de suivre de prestigieuses études.

Après le lycée, elle obtient une licence à l'Université de Toronto et obtient son diplôme de droit au London School of Economics and Political Science.

En 1949, elle retourne en Dominique et pratique le droit à Roseau: elle devient de ce fait la première femme avocate dans le pays.

Eugénia Charles, jeune avocate, en 1949.

Engagée en politique dans les années 60 pour défendre la liberté de la presse, elle joue un rôle actif dans la fondation du Dominica Freedom Party, un parti politique conservateur. Sa position lui permet de prendre la tête du groupe, qu’elle dirigera de 1975 à 1995.

En 1980, le parti d’Eugénia Charles remporte les élections, la propulsant au poste de premier ministre. Elle devient dès lors la première femme à occuper un poste de cheffe d’état dans la Caraïbe.

Clé de voûte dans la construction de la coorpération caribéenne

Signataire du traité de Basseterre – St-Kitts- en 1981, qui marque le début de l’OECS – l’Organisation des Etats de la Caraïbe orientale – elle fait figure de pionnière dans la construction de la coopération régionale caribéenne.

Avec les chefs d’Etats de la Grenade, Montserrat, Saint Kitts and Nevis, Sainte-Lucie, Saint Vincent les Grenadines, ils s’engagent notamment à s’entraider et à défendre l’indépendance et la souveraineté nationale de chacun.

Une figure politique controversée

Lors de ses mandats « Dame Charles » s’est illustrée par son combat contre la corruption, sa lutte contre l’évasion fiscale et le rejet de la légalisation des casinos en Dominique, au profit de marchés étrangers.

Cependant, comme l’indique son surnom de « La Dame de fer de la Caraïbe », ses positions inflexibles et surprenantes en font une figure politique controversée.

En effet, en 1983, elle apparait dans une conférence de presse en tant que dirigeante de l’Organisation des états de la Caraïbe orientale aux cotés de Ronald Reagan, président des Etats-Unis. Lors de ce discours, elle se positionne favorablement pour l’invasion de la Grenade par le gouvernement américain.

Après 15 ans à la tête du pays , Eugénia décide de ne pas se représenter aux élections de 1995. Elle poursuit en tant que conférencière et s'engage dans la lutte pour les Droits de l'homme.

Ayant subi des attaques misogynes - dues à son célibat - tout au long de sa vie publique, la carrière d'Eugénia Charles force d'autant plus l'admiration par sa longévité au pouvoir dans des conditions d'exercice hostiles.

Elle fait désormais figure de pionnière historique caribéenne.

Sources (clic pour ouvrir) : Blog de LSE (London School of Economics and Political Science) , University of London, Blog Repeating Islands

Eugénia Charles, en 1981.

Eugénia aux côtés du président Reagan lors de l'annonce de son soutien de l'invasion de la Grenade.
Debut de son intervention à 4:00.